Journées du patrimoine
Samedi 18 septembre 2021
A l’occasion des Journées du Patrimoine, Yves Caraglio, chercheur et botaniste de l’association A.R.B.R.E, nous propose une balade mi-urbaine, mi-rurale à la découverte de quelques beaux arbres de nos villages. Le rendez-vous est fixé sur le parking de la pharmacie de Beaulieu-Restinclières à 16h30. Yves est accompagné de Claire Atger, spécialiste du système racinaire et Pascal Genoyer, tous deux professionnels de l’arbre dans la ville.
Nous sommes 25 adultes et 2 enfants en quête de nouvelles découvertes.
En introduction Yves rappelle les critères intervenant dans le classement d’un arbre comme « remarquable » : sa dimension, une forme particulière, son appartenance à une espèce rare localement, son aspect historique.
Une association dénommée ARBRES (https://www.arbres.org/) classe, étiquette les arbres dits remarquables. Cela offre un statut de protection et des précautions d’usage à des fins de conservation.
Nous cheminons sur la route de Restinclières et pouvons observer une chênaie verte de hauteur moyenne sur la partie droite de la route avec un chêne blanc plus clair qui se détache de l’ensemble. On aperçoit à distance sur le trottoir de gauche une silhouette massive, plus claire. On peut voir à travers. En approchant on constate qu’il s’agit de deux arbres avec des densités de feuillage différentes, le gros cache le petit. L’un d’eux comprend plein d’axes morts. On peut parler de « dépérissement » pour des questions climatiques ou d’âge. Une météo très sèche va activer la mortalité. Il est mal parti. C’est sans doute un rescapé de la garrigue dans laquelle on utilisait autrefois certains arbres pour assurer de l’ombre aux moutons. Les constructions d’habitations ont entamé la garrigue mais certains arbres ont été épargnés quand ils se trouvaient en limite de parcelles. Le chêne vert que nous avons sous les yeux a subi des coupes de racines dans le cadre des aménagements de voirie à l’origine peut-être de ses difficultés actuelles. Les jours de ce bel arbre sont comptés…

Sur le trottoir de droite nous sommes devant un chêne multi-troncs. Cet arbre a subi plusieurs coupes notamment pour récupérer du bois de chauffage. On a affaire à une cépée.
Arrivés près des écoles, nous traversons pour nous rapprocher du stade et là on observe une filaire qui appartient à la famille des oliviers, elle est chargée de petits fruits noirs.
La balade se poursuit le long du ruisseau du Mas du Lauriol. Là, les arbres ont davantage de ressources. On devrait trouver des gros diamètres mais ce n’est pas le cas ici. Peut-être y-a-t-il eu des coupes et des remplacements d’arbres ? Des frênes sont présents. Par suite de rabotages et étêtages successifs des branches sèchent. L’arbre résiste bien néanmoins aux coups de vent du nord qui assurent une pression constante mais moins bien aux coups de vent du sud plus rares. Un risque de fragilisation de l’arbre existe avec de la casse et du déracinement. En revanche, l’arbre peut pousser en position inclinée sans dommage particulier. On observe qu’après un « ravalement de tête », le lierre a disparu. Yves en profite pour revenir sur des idées préconçues à propos de cette plante que l’on s’évertue souvent à couper. Le lierre ne rentre pas dans le tronc, il reste en périphérie. Ainsi l’écorce de l’arbre est à l’abri du soleil et garde l’humidité. Si l’arbre pousse correctement, le Lierre ne dépasse pas l’arbre. Si l’arbre dépérit le lierre passe au-dessus. Ici certains arbres ont environ 70 ans. Le caractère remarquable peut aussi concerner les soudures des rejets après des coupes. On peut trouver de beaux exemples dans la forêt de Tronçais dans l’Allier.
Yves au pied d’un frêne. Au bord du Lauriol à Restinclières.
Au bout du chemin qui serpente le long du Lauriol nous arrivons devant le joli pont de pierre sur la route départementale 610 qui a fait l’objet d’un réaménagement pour en faciliter le franchissement par les piétons. Cette route est plantée d’un alignement de platanes. Cet arbre introduit en France vers 1780 a des origines géographiques diverses. Le platane d’Orient natif de Grèce est arrivé en Italie via Rome. Le platane d’occident vient des États-Unis et s’est acclimaté en Europe. C’est un hybride de ces deux espèces que l’on trouve le long des routes. Bien qu’hybride, il est propagé par bouture mais a aussi un petit potentiel de colonisation naturelle par graine. Ce type de plantations en alignement routier assurait de l’ombre et une visibilité d’approche. C’est un bois dur qui permettait la fabrication des étals de boucher. Il a d’autre part une très forte capacité à fermer ses plaies. Les racines se soudent entre elles et peuvent former à l’occasion une sorte de trottoir. Après une coupe il refait du bois de chauffage en deux/trois ans d’où la pratique de faire des coupes basses. Il est aussi remarquable par sa hauteur (30m et plus). Enfin il présente parfois l’originalité d’absorber ce qui l’entoure comme les pieds des bancs de la promenade du Peyrou à Montpellier. Ses racines peuvent faire la taille des troncs précise Claire comme on peut le voir à Fontmagne au bord du Bérange.

Nous circulons sur une voie piétonne aux abords du nouveau lotissement. Petit clin d’oeil à une aubépine à ne pas confondre avec l’azérolier, preuve à l’appui après examen de la baie rouge par Yves qui compte le nombre de style restant sur le fruit (un seul : aubépine, plusieurs : azérollier).
Près de l’aubépine. L’aubépine.
Après les jeux pour enfants très fréquentés ce samedi après-midi, nous arrivons à un carrefour qu’orne un très beau peuplier blanc généreux qui ne ressemble pas au peuplier noir habituel en faisceau ou cylindrique (port fastigié). Yves indique que le peuplier est un arbre qui forme une large couronne. On peut voir de beaux peupliers noirs au bord de la Mosson.

Sur le chemin du château menant chez Louise Achard, nous nous arrêtons devant un frêne à feuilles étroites dont le tronc héberge un champignon marron. Yves nous explique que ce champignon s’est d’abord développé à intérieur du tronc puis il a sorti ses fructifications. Entre l’arbre et le champignon s’opère un échange mutuel : l’arbre fournit les produits de la photosynthèse et le champignon l’eau et des éléments minéraux qui alimentent les racines de l’arbre. En cas de déséquilibre, l’arbre peut dépérir.
Le clou de la sortie est un magnifique platane dans la propriété de la vice-présidente d’A.R.B.R.E. Nous nous plaçons à l’aplomb de sa couronne qui mesure quelques 24 mètres de diamètre (haut-pied). Le tronc mesure 80 cm de diamètre environ. Yves nous signale un platane à Lamanon (Bouches-du-Rhône) dont la couronne mesure 50 mètres de diamètre. Normalement le platane « marcotte » en émettant des racines sur les branches qui touchent le sol. Quand on ramasse ses feuilles tombées au sol on le prive de nourriture, on interrompt le cycle naturel en empêchant des insectes et des bactéries de se développer. Yves décortique une boule de platane (ensemble de fruits) pour en extraire un fruit contenant une graine minuscule à l’intérieur. S’agissant d’un arbre hybride, cela ne donnera rien. Il nous montre les petits poils qui provoquent de l’allergie quand les fruits sont mûrs à l’automne et au printemps sur les jeunes pousses.
Feuille et fruit du platane. Ouverture du fruit. Les tigres du platane. Le platane chez Louise.
Nous arrivons à la fin de la promenade « remarquable » pour toutes les petites découvertes que nous avons faîtes sous un ciel clément avec une température des plus agréables. Il y aura une suite nous promet Yves.
Il nous reste à remercier chaleureusement notre guide toujours très pédagogue et ses deux collègues, Claire et Pascal, qui ont complété ses explications.
———————
Régine Paris
Merci aux photographes Sylvie et Patrick