Sortie « Truffes » dans les carrières de Beaulieu

Samedi 10 mai 2025 à 15 heures

Intervenant :

Franck Richard, professeur à l’Université de Montpellier dans le département Biologie, Écologie et Évolution

Cette sortie initiée par l’association ARBRE est conduite par Franck Richard, professeur à l’Université de Montpellier dans le département Biologie, Écologie et Évolution, avec la participation de Lucas, jeune doctorant qui travaille sur une nouvelle truffe énigmatique trouvée sous différents cistes.

Jean-Pierre Braye qui nous avait invité dans sa truffière l’an dernier est venu avec sa chienne truffière, Astra, ratier-caniche âgée de 12 ans.
Nous sommes 14 adultes et trois enfants. Nous nous dirigeons vers la carrière du Génie.
L’écologie des truffes concerne une dizaine d’espèces dont la truffe du Périgord dans le Vaucluse, la truffe d’été, la truffe de Malençon (odeur d’excrément, espèce mycorhizienne trouvée sous des cistes de 2 mètres de hauteur, sur très peu de terre dans le parc des carrières créé à l’emplacement d’un ancien dépôt d’ordures).
Toutes les plantes qui produisent du carbone sont mycorhizées. Un tiers du travail est effectué par les champignons. On peut parler d’entraide, de symbiose mutualiste qui protège contre les maladies. Ça se passe par les racines. Les centaurées, les mauves, le plantin … on observe des mycorhizes microscopiques, invisibles. Pour voir les filaments, il faut utiliser une loupe binoculaire.

À l’endroit où nous sommes il n’y a pas de truffes
Dans le système « pelouse », on ne voit rien. Dans le système « forêt » on voit les champignons (les fructifications que l’on récolte). C’est ainsi que 1 000 champignons mycorhizent 150 000 plantes. La forêt est un milieu riche aussi en champignons de Paris non mychorhiziens.

    On distingue ainsi trois groupes de champignons :

    • mutualistes (truffes)
    • parasites (oïdium, rouille)
    • décomposeurs (type champignons de Paris).

    La truffe est rare, mais pas ici. Si un chêne arrive, la pelouse se transforme. Des brûlés (zones dénudées indiquant la présence du champignon mycorhizien qui agit comme un herbicide sur les graines qui arrivent) fournissent le phosphore par « siphonnage » par le champignon sur les petites plantes (dites « plantes compagnes », car elles assurent la croissance du mycélium) qui faiblissent et disparaissent. Le champignon n’effectue pas de photosynthèse.
    Ici réside une communauté de plantes avec ses champignons propres. Il y a une petite rémunération pour la plante. On recherche des champignons sous les cistes.
    Les érables, oliviers et fruitiers sont des arbres endomycorhiziens (les filaments du champignon traversent les tissus de la racine) à la différence des noisetiers, hêtres, chênes et cistes qui sont ectomycorhyziens (le champignon forme des petits capuchons autour de racines courtes).
    Chemin faisant, Astra nous a déniché des truffes.

    Nous faisons un deuxième arrêt en forêt avec peu de lumière. On a perdu des plantes (moins d’espèces), on a gagné des champignons. Le pin d’Alep, le chêne vert, le chêne blanc peuvent héberger des centaines de champignons. Ils sont en réseau. Les filaments sont dans les racines. La canopée du chêne vert fournit 40 % du carbone au champignon. On peut appliquer le dicton : « Je mange maintenant, je paye après ».
    Il faut trouver l’arbre qui offre à la fois le gîte et le couvert pour mettre en place un réseau mycorhizien.
    Il s’agit d’un réseau étendu et complexe. Franck cite une truffière naturelle dans les Pyrénées orientales qui mycorhize à 30 kilomètres alentour. Entre individus de plantes de la même espèce, la mycorhization s’effectue sur les jeunes et les vieux. Entre individus d’espèces différentes, les bouleaux qui sont des plantes pionnières (s’installent dans des zones ouvertes) nourrissent les Douglas qui leur rendent ensuite. Les réglages des échanges entre les espèces au travers des filaments du champignon se font en fonction de l’éclairage parvenant au sol. Quand le Douglas prend le dessus, le bouleau disparaît.

    Franck Richard attire notre attention sur l’hélianthème, un tout petit arbuste en limite forestière qui a une durée de vie de vingt ans et qui héberge la même sorte de champignons forestiers que le chêne. Si on consulte les bases de données, on ne trouve pas d’espèces décrites !

    On évoque la truffe de Malençon, le fumana à feuille de bruyère, le thym. On parle de l’hélianthème des Appenins : Helianthebum appeninum, sous laquelle on a trouvé la nouvelle truffe. On a procédé à l’examen des différents milieux. C’est là qu’il est le mieux avec 30° l’été et quatre à cinq mois sans eau.
    La plus grande partie des échanges passe par ses racines.
    Le gloméris (cloporte) adore les truffes. Les limaces assurent la germination des spores dans leur appareil digestif.
    On procède à une recherche sous un hélianthème.

    Franck Richard évoque les disperseurs de truffes :

    • la mouche : six espèces pondent leurs œufs dans la truffe. On détecte la présence des mouches qui pondent. On se met sur un brûlé, elles reviennent.
    • un coléoptère, le genre Léiodes. La larve fait des galeries dans la truffe. Pour la lutte, on pose des pièges.
    • le sanglier : la truffe contient des substances identiques aux phéromones de la laie. Les spores sont conservées dans l’appareil digestif et leur capacité à germer est plus grande après être passé dans le tube digestif. Le sanglier sert donc de disperseur. À titre anecdotique : le sanglier absorbait le césium des bolets après Tchernobyl.

    Dans le secteur des tombes, on trouve le cade endomycorhizien. C’est une plante charnière : gîte ou couvert ? Il pourrait faire le couvert pour la truffe après examen des racines. On travaille sur l’ADN.
    Au XIXᵉ siècle, on découvre une espèce mycorhizienne : le genévrier commun truffier.

    Il existe 360 ouvrages sur le sujet et déjà 3 000 évocations fin 18ᵉ (1778).


    D’après les notes de Régine Paris et la relecture appréciée d’Yves Caraglio

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    Publié le 10 Mai 2025, dans Sorties découvertes, et tagué , . Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.

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