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Des insectes et des plantes

Du 12 au 17 novembre 2018

Cette année ARBRE vous propose d’aller à la découverte d’une histoire vieille de plusieurs millions d’années. Une partie des  insectes et les plantes sont en étroite liaison depuis fort longtemps dans des histoires de vie plus ou moins compliquées. Mais le monde des insectes ne se résume pas à cette relation.

Les insectes, agaçants tels les moustiques,  stressantes telles les guêpes, omniprésentes telles les fourmis, auxiliaires des agriculteurs comme les coccinelles… C’est un monde extrêmement diversifié en constante interaction avec les milieux vivants. Mais cette diversité sera bientôt du passé, en effet les insectes disparaissent en masse. Moins de papillons dans les champs, silence des grillons dans les campagnes, plus de course derrière les lucioles les chaudes nuits d’été. « La biodiversité se réduit », « l’environnement change ». Ces expressions sont tellement entendues qu’elles peuvent en devenir banales et rendre le phénomène lointain et abstrait. Et pourtant, la menace sur les insectes est bien réelle, l’exemple de la diminution des populations d’abeilles en est la triste illustration : moins d’abeilles,  moins de nourriture pour les hommes, le tiers de ce que nous consommons est lié à l’activité des abeilles domestiques et sauvages.

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Toute la semaine du 12 au 17 novembre, des expositions à la Bibliothèque de Restinclières vous feront découvrir le monde fabuleux des insectes (Maison Départementale de l’Hérault) et les relations entre des plantes et des insectes de nos garrigues (Liliane Delattre; projet Floris’Tic). –

Le mercredi 14 novembre  les enfants pourront découvrir l’origine du miel et l’utiliser dans des recettes simples  avec les animatrices de l’Effet Gomasio sur deux ateliers :
• Salle du Clos St Vincent (10h30) à Beaulieu
• Bibliothèque municipale de Restinclières (14h30)

Le vendredi 16 novembre, à 19h, dans la salle de la bibliothèque de Restinclières, les petits et les grands pourront écouter Liliane Delattre (imatiamou.fr) qui revisitera la fable de la Cigale et la Fourmi sous un angle historique et biologique.

Le samedi 17 novembre, à 20h, soirée-débat pour clore cette semaine, dans la salle du Foyer de Beaulieu. Avec principalement :

  • Stéphane Jaulin de l’Office pour les Insectes et leur Environnement (OPIE Hérault) nous parlera de la diversité, du rôle et de la fragilité des insectes.
  • Lucas Etienne étudiant en Master à l’université de Montpellier nous présentera les relations entre des insectes et des plantes trompeuses
  • Bertrand Schatz du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS Montpellier) nous présentera l’histoire de l’abeille et des hommes en Cévennes.
  • Jean-Pierre Almes Apiculteur à St-Drézéry et membre du Groupement de Défense Sanitaire Apicole (GDSA Hérault) apportera son témoignage pratique, exposera une variétés de ruches, et proposera sa récolte locale de miel.

Liens pour réserver « Atelier miel » et « Fable revisitée »

Soirée Regards croisés sur l’olivier

Samedi 18 novembre 2017 à 20h – Foyer de Beaulieu

Une cinquantaine de personnes, réunies dans la grande salle du foyer municipal de Beaulieu, ont participé à la 5ème édition de Regards croisés sur l’environnement, organisés chaque année par l’association ARBRE avec pour thème cette année, l’olivier.

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En introduction, Jean-Pierre Fels, président de l’association rappelle la mobilisation de l’équipe de bénévoles de l’ARBRE en matière de sensibilisation  et d’éducation à l’environnement au profit principalement des enfants et des adultes des deux communes de Beaulieu et Restinclières. Cette soirée fait suite à une exposition et une animation tapenade du mercredi 15 novembre à la bibliothèque de Restinclières qui a réuni 24 enfants de la commune et à la visite l’après-midi de l’oliveraie de M. Marquez.

Yves Caraglio, chercheur au CIRAD et conseiller scientifique de l’association, présente les trois invités de la soirée qui, chacun dans leur domaine, vont parler de l’olivier.

Le premier intervenant Jean-Frédéric Terral, universitaire, biologiste et écologue, propose :

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1 – Une histoire de l’olivier sur les plans biologique, économique et archéologique

A – L’olivier, emblème de l’antiquité

A la période romaine, l’olivier était utilisé pour l’éclairage (lampes à huile) et les olives constituaient un aliment de base. Ces produits étaient transportables et facilement conservables dans des jarres, des amphores dans lesquelles on a pu retrouver des restes de noyaux. Ils étaient importés d’Afrique et de Bétique. Les olives étaient conservées dans de la saumure ou du vinaigre. L’archéologie a permis de documenter des restes d’huileries en Afrique du Nord, région où on a retrouvé des structures de pressoir à raisin et à huile. L’Olea europaea était présent sur tout le pourtour méditerranéen. D’autres sous-espèces existaient comme l’olivier marocain à Madère, dans le Hoggar, en Afrique du sud. Une seule sous-espèce a été domestiquée. Linné a identifié deux formes.

B – L’origine ancienne de l’olivier

L’olivier existe depuis des millions d’années. Il est le symbole de la Méditerranée. Sous l’effet conjugué du mouvement des plaques tectoniques et des changements climatiques dans la dernière partie de la période glaciaire, il y a 18 000 ans, l’olivier a reculé vers le sud dans des zones refuges puis avec le réchauffement il est remonté vers le nord encouragé aussi par sa culture.

L’olivier sauvage ou oléastre (la variété sylvestris), fournit des petits fruits et se reproduit par voie de graines.

L’olivier cultivé ( la variété sativa) se reproduit par clonage.

C – La domestication et la diffusion de l’oléiculture

La domestication a démarré au Levant, là où se situe Israël aujourd’hui et au Liban, vers l’an 800 avant JC, ce qui a correspondu avec l’installation des Phocéens. Les phéniciens disposaient de comptoirs en Afrique du nord (Carthage) depuis les guerres puniques.

Les Grecs, les Phocéens, les Etrusques puis les Romains ont développé l’oléiculture en Orient. L’archéologie a révélé des traces d’huile remontant à 6 000 ans avant notre ère. Des cuvettes taillées dans le roc et des tablettes ont été retrouvées à Ebla en Syrie, datant de 2 300 avant J.C. Ces découvertes ont donné beaucoup d’informations sur l’olivier. Ainsi, la recherche conjuguée en archéologie et en botanique a permis d’identifier des restes de fruits (c’est la carpologie) et de charbon de bois (l’anthracologie) sans toutefois pouvoir différencier les olives sauvages des olives domestiques. Des noyaux d’olives carbonisés ont été trouvés en Palestine sur des lieux de pressurage. On se servait des noyaux pour chauffer.

Les études menées à partir de la taille et de la forme des noyaux actuels et anciens permettent la constitution d’un référentiel. On procède ainsi à une approche comparative passé/présent à partir des restes de noyaux retrouvés sur le site d’Ebla en Syrie. Il en est de même de la « picholine marocaine », différente de la nôtre, qui représente 90% de la surface cultivée. Il s’agit d’une variété importée du Levant, croisée avec des espèces locales et domestiquée par les Berbères. Ainsi les foyers de domestication sont-ils étrangers au lieu de diffusion.

On a affaire à une structuration génétique extrêmement complexe de l’olivier méditerranéen.

A une question d’un auditeur qui souhaitait savoir si l’état de la surface du noyau permettait de fournir des indications, la réponse est non : la surface du noyau est trop érodée par le temps mais effectivement il existe des variétés dont les noyaux sont plus crevassées que d’autres.

Tout au long de son exposé passionnant et de plus en plus complexe, Jean-Frédéric Terral a illustré son propos avec la projection de cartes géographiques du pourtour méditerranéen, de croquis pour différencier les sortes de noyaux et de tableaux comparatifs. C’est ainsi que le public a pu découvrir les toutes dernières recherches menées pour connaître les origines, les migrations et les mutations de cet arbre à la fois mythique et d’une grande modernité.

Yves Caraglio donne la parole au deuxième intervenant de la soirée : Jean-Michel Duriez, Directeur adjoint de l’Association Française Interprofessionnel de l’Olive (AFIDOL), limitée à la zone continentale de la culture de l’olive.

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En préambule M. Duriez précise que l’archéologie et la botanique sont utilisées par l’organisme qu’il représente ce soir dans un esprit de marketing : en faire une signature de terroir. Il démarre son exposé par la présentation de la culture de l’olivier en France :

  • 1,2 million d’oliviers plantés dans les 10 dernières années,
  • 5 millions d’oliviers cultivés sur 50 000 ha environ,
  • 10 000 oléiculteurs professionnels sur 17 000 ha,
  • 40 000 oléiculteurs familiaux sur 33 000 ha,
  • 5 000 oléiculteurs assurent 90 % de la production nationale et 100 % des produits vendus.

La consommation a explosé en France avec 110 000 tonnes. Elle a été multipliée par cinq mais la production ne représente que 3,6 % de la consommation nationale. 98 % de l’huile d’olive vendue en France est extra vierge (pure). Il ne faut pas acheter l’huile « raffinée ».

Il s’agit d’un marché très qualitatif avec un total de 5 000 T, 2 000 T sont autoconsommées, 2 000 T sont vendues en AOC et on compte un total de 2 000 T d’origine France.

On dénombre 1 500 communes oléicoles. On a créé un logotype en 2005 : Huile d’olive de France qui constitue une appellation d’origine.

L’AOC permet de valoriser et de conserver le patrimoine avec une culture traditionnelle Il faut attendre 10 ans pour atteindre la rentabilité. La transgénérationnalité signifie que l’on plante un olivier pour les générations futures : on cultive une plante ancienne.

Actuellement on dispose de :

  • 6 AOP d’huile d’olive
  • 6 AOP pour les olives
  • 1 AOC huile d’olive de Provence
  • 1 AOP de pâte d’olive (Nice).

Depuis les années 1990-1995, on cultive aussi l’olivier en haie fruitière, donc en haute densité, ce qui signifie :

  • Une mécanisation maximale,
  • Une vie réduite du verger, de l’ordre de 20-25 ans,
  • Un paysage oléicole nouveau,
  • Une biodiversité réduite à 3 variétés sur les 2 000 recensées. A terme, si cette pratique se généralise, il y aura appauvrissement génétique sans possibilité de retour aux variétés anciennes dont la robustesse et la stabilité ont fait leur preuve.
  • Une rentabilité élevée à court terme,
  • Pas de transgénérationnalité,
  • Une surface cultivée actuelle de l’ordre de 500 ha,
  • Un investissement financier le plus rentable possible sur 10 ans,
  • Un terrain plat pour permettre l’irrigation,
  • On récolte un hectare en deux heures.

La culture biologique de l’olivier est possible en AOC et en haie fruitière. Entre 2007 et aujourd’hui, les surfaces cultivées ont été multipliées par quatre. Dans le Gard et l’Hérault, on a prêté beaucoup d’intérêt à la culture en Bio qui se fait de trois façons :

  • Le bio-business opportuniste, de masse et de qualité basique,
  • Le bio premium fortement marketé,
  • Le bio authentique qui correspond à un choix philosophique et ne s’effectue pas en haie fruitière.

Le principal obstacle rencontré, c’est la mouche contre laquelle on dresse une barrière physique avec de l’argile ou du talc ou par un piégeage massif.

La compatibilité de l’Olea europaea et de l’Homo sapiens nécessite :

  • Le compagnonnage de l’homme : inscription dans le paysage,
  • Un climat méditerranéen,
  • Des hivers doux car l’olivier est sensible au froid,
  • Du vent (pour la pollinisation).

L’olivier vit très longtemps. Il fait des rejets –des souquets-. Ses ennemis sont le froid, l’humidité et le feu. C’est un arbre mythique et symbolique. Il est très utile (huile d’olive, le bois, les soins du corps…). Il convient à la fois aux soins du corps (régime crètois) et de l’âme (apaisement dans les oliveraies).

La protection de l’olivier contre la mouche est replacée dans la modernité :

  • Une agriculture raisonnée existe depuis les années 1980,
  • Mise en place d’une lutte biologique par lâcher d’insectes,
  • Amélioration des connaissances sur la pollinisation,
  • Sélection de clones,
  • Développement de lutte sémiochimique (signaux chimiques attirant les insectes).

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3 – Intervention de Monsieur Dusserre, oléiculteur familial à Beaulieu

A l’entrée de la salle du foyer, M. Dusserre a exposé différentes variétés d’olives qu’il cultive :

Il nous précise qu’ils sont 4 producteurs à Beaulieu (1 professionnel et 3 amateurs) qui portent leur récolte au moulin de Villevieille (coopérative). Il est adhérent de l’association Mon olivier[1] à laquelle il verse une cotisation annuelle de 10 €. Il s’est initié à la culture de l’olivier au moment de la retraite et c’est devenu une passion Il pense qu’on peut difficilement en vivre. La récolte au moyen d’un peigne électrique est un gros travail. Il s’est formé avec les conseils de l’AFIDOL[2]. Cet organisme lance des alertes concernant la mouche, incitant à traiter pour éviter les pertes de récolte. Pour sa part, il utilise les produits phytosanitaires conseillés par l’AFIDOL. Il favorise l’enherbement naturel avec notamment des urospermes et des fausses roquettes remarquables au moment de leur floraison.

Il conseille deux livres :

  • Identification et caractérisation des variétés d’oliviers cultivés en France par Nathalie Moutier et collaborateurs (Editions Naturalia).
  • Histoire de l’olivier de Catherine Breton et André Bervillé (Editions Quӕ)

D’après lui, la Lucques cultivée dans l’Hérault et l’Aude est la meilleure olive pour être consommée à table. La Picholine, originaire de Collias (Pont du Gard) est majoritaire dans le Gard et l’Hérault (huile et olives vertes). La négrette, cultivée de l’Ardèche à Lodève, est une bonne variété pour la fabrication de l’huile. L’aglandau est une variété ancienne cultivée en Provence, dans la vallée de la Durance, et depuis 1990 en Languedoc. Cette espèce porte des noms différents selon les endroits.

A l’époque des moulins à meule et presse, les huiles d’olive consommées en France portaient la mention : première pression à froid, mention sans valeur aujourd’hui. Désormais avec les moulins modernes, la mention qui doit être portée sur la bouteille est : huile d’olive vierge extra.

Trois fruités apparaissent lors des dégustations (triangle du goût de l’AFIDOL) :

  • Fruité vert = goût intense obtenu à partir d’olives vertes.
  • Fruité mûr : goût subtil obtenu à partir d’olives noires.
  • Fruité noir (olives maturées dans un conteneur clos une à deux semaines) = goût à l’ancienne.

D’après M. Dusserre, les meilleures huiles en fruité mûr sont celles de Nyons et de Nice.

A l’issue de cette contribution locale, M. Dusserre invite le public à venir déguster trois huiles sur des petits morceaux de pain de campagne ou à la cuillère :

  • La Bouteillan, fuité vert (note herbacée).
  • L’huile d’Antan, à base de picholines (note d’olives noires).
  • La Négrette, fruité mûr (note de fruits).

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Jean-Pierre Fels remercie chaleureusement les intervenants et invite le public à se retrouver pour la dégustation d’huile et pour partager le buffet offert par l’ARBRE.

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Régine Paris avec la relecture d’Yves Caraglio et Alain Dusserre

[1] www.mon-olivier.org

[2] Association Française Interprofessionnelle De l’Olive

Visite d’une oliveraie

Balade dans l’oliveraie de Monsieur Marquez

Dans le cadre du Regards croisés sur l’olivier les adhérents et sympathisants de l’ARBRE étaient invités samedi après-midi 18 novembre 2017 à 16 heures à découvrir l’oliveraie de Monsieur Marquez à Restinclières. 25 adultes et 5 enfants étaient de la partie par ce bel après-midi ensoleillé d’automne.

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Monsieur Marquez a guidé la petite troupe, s’arrêtant une première fois devant un olivier produisant des picholines, variété bien adaptée à la région, avec un arbre ne craignant ni la sécheresse ni le froid -qui ne rentre pas dans le bois-. Les olives sont un peu plus petites cette année compte tenu de la sécheresse mais autrefois il n’y avait pas d’irrigation.  Une petite compensation au manque d’eau : l’absence cette année de la mouche de l’olivier qui, l’an dernier, a fait beaucoup de ravages. Aussi çà et là nous apercevions des pièges sous la forme de bouteilles plastiques suspendues aux branches, percées de trous dans la partie supérieure et remplies soit, d’un mélange de phosphate d’ammoniac et d’eau soit, plus naturellement, d’une sardine suspendue pour attirer ladite mouche qui, ne pouvant plus ressortir de la bouteille, se noie.

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Monsieur Marquez nous explique que les différentes variétés d’olives se reconnaissent à la feuille de l’arbre mais il faut vraiment être expert pour distinguer les nuances entre les feuilles. Certaines s’y sont essayées sans trop de résultat, semble-t-il.

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Un petit stop devant l’olivier qui produit l’olive aglandau qui possède un petit noyau et qui, apportée au moulin à maturité, produit une huile de qualité. Là notre guide explique qu’avec un peigne long on peut ramasser à la main 50 kg d’olives par jour. On enlève ensuite les feuilles avec un ventilateur. L’an dernier, 100 kg d’olives permettaient d’obtenir environ 12 litres d’huile. Puis nous faisons un arrêt devant un olivier respectable, âgé de quelques 200 ans, produisant l’olive appelée négrette. Chemin faisant, M. Marquez nous emmène dans une parcelle où il a planté il y a dix ans des oliviers produisant l’olive médula . Ces petits oliviers sont protégés au sol par une herbe ronde. Il s’agit d’un essai. C’est sa première récolte. Il faut être patient…

Nous continuons notre déambulation pour découvrir les oliviers produisant les variétés suivantes : la Lucques –il faut arroser la longue-, la Verdal de l’Hérault -7 à 8 ans sont nécessaires pour une première récolte-, la Violette de Montpellier, la Clermontaise, l’Olivie -qui plairait à un verrier-mais qui nécessite un arrosage pour produire plus de 60 kg d’olives par pied.

Notre étonnement est grand devant un vieux plantier de 300 ans produisant des négrettes qui malgré la gelée du terrible hiver 1956 est reparti vaillamment. Quelle endurance !

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Pour conclure cette sortie nature, M. Marquez, en esthète de l’olivier, nous explique qu’il n’utilise ni sulfatage ni argile. Il préfère le thym et les huiles essentielles. Il prend son temps et observe le comportement de ses arbres. Il a l’éternité devant lui et nous… un superbe coucher de soleil embrasant un paysage magnifique.

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Régine Paris

L’atelier tapenade

Mercredi 15 novembre à la bibliothèque municipale de Restinclières

Dans le cadre de Regards croisés sur l’olivier l’association ARBRE [1] a proposé aux enfants âgés de 6 à 10 ans de participer à un atelier tapenade animé par les deux cuisinières de L’effet Gomasio qui proposent une cuisine bio-végétarienne.

Deux groupes de 12 enfants se sont ainsi réunis, l’un le matin et l’autre l’après-midi, dans la bibliothèque de Restinclières, transformée pour la circonstance en cuisine méditerranéenne, autour d’une grande table sur laquelle avaient été déposés délicatement des herbes fraîches, des herbes séchées, des fruits secs et bien sûr des olives dont la cueillette se déroule en ce moment.

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Un petit tour de table a permis de mettre les enfants en confiance en leur demandant de sentir puis de reconnaître, dans la mesure du possible, tous les ingrédients proposés pour la fabrication de la tapenade. Ainsi  du côté des herbes fraîches :

  • le romarin : qui en a dans son jardin ? Quelques mains se lèvent !
  • le thym : il s’émiette un peu à cause de la sécheresse et il pique …
  • le laurier-sauce : on casse la feuille pour mieux la sentir !
  • la sariette : un bien joli nom pour une herbe de la garrigue,
  • la verveine citronnée que l’on utilise pour la tisane,
  • l’ortie séchée … qui ne pique plus,
  • la sauge, un peu moins connue,
  • la menthe,
  • le basilic qu’on utilise pour la fabrication du pesto italien ou pistou provençal.

On découvre les fruits secs avec  lesquels on fabrique aussi de l’huile :

  • les noix décortiquées. Petit rappel : avec la coque on fabrique le « brou » de noix,
  • les graines de tournesol,
  • la noix de coco rapée … qui fera le délice d’un petit gourmand !
  • la figue sèche,
  • les graines de sésame.

Du côté des fruits séchés, on reconnaît :

  • les raisins secs,
  • les tomates séchées,
  • l’ail et l’échalote,
  • les grains de moutarde, le fenouil, le gingembre, des citrons.

Et pour adoucir les assemblages, du fromage frais.

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Maintenant on va passer aux travaux pratiques. Les enfants sont répartis par groupes de trois. L’après-midi les 7 petits garçons forment le gros du bataillon. Le plus jeune acceptera la compagnie de deux filles. Chaque groupe est invité à fabriquer deux tapenades différentes en choisissant librement les ingrédients à ajouter aux olives vertes et/ou noires à disposition.

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La répartition des tâches s’effectue sans problème : l’un-e écrase les olives dans un mortier à l’aide d’un pilon, un-e deuxième ajoute les ingrédients choisis dont les noms sont soigneusement notés sur une feuille de papier par un-e troisième. On goûte pour apprécier le mélange et l’adoucir le cas échéant. Parfois ça pique un peu … à cause des graines de moutarde !

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On termine la préparation avec le mixer pour obtenir une tapenade homogène.

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Arrive le moment de la dégustation sur des petits carrés de pain bio.

 

 

Les animatrices proposent de goûter aussi les olives que l’on consomme couramment dans la région et qui ont été au préalable désamérisées  dans une saumure : les picholines vertes, les lucques vertes et pointues et les négrettes cultivées dans le Languedoc, les kalamatas violettes originaires de Grèce.

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Les adultes sont invité-es au goûter tapenade et chaque enfant partira avec un échantillon de ses préparations et la recette à découvrir en famille.

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Cet atelier cuisine a beaucoup plu aux enfants et en partant, ils pouvaient découvrir les panneaux d’information sur la culture de l’olivier prêtés par la Maison départementale de l’environnement (MDE).

Merci aux cuisinières de l’Effet Gomasio, à Evelyne, bénévole à la bibliothèque qui s’est occupée de la préparation matérielle de la « cuisine improvisée », à l’association 123 Soleil de Restinclières qui a assuré l’information auprès des parents et des enfants et aux bénévoles de l’association ARBRE, Jean-Pierre, Jacqueline, Régine, Louise et Peter qui ont assuré une présence discrète pendant le déroulement des ateliers et le reportage photographique.

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Régine Paris

[1] Association Restinclières Beaulieu pour le Respect de l’Environnement

Regards croisés

l’Olivier : tellement ancien mais toujours moderne ! 

Toujours dans le souci de faire connaître notre environnement de vie proche, l’association ARBRE vous propose pour sa 5e édition un « Regards Croisés » sur l’Olivier : tellement ancien mais toujours moderne !

Cette manifestation se déroulera du 10 au 18 novembre 2017

À la bibliothèque de Restinclières (près de l’église ici)

  • Exposition sur l’Olivier visible à partir du vendredi 10 novembre à la bibliothèque municipale de Restinclières.
  • Visites de l’Oliveraie de Michel Marquez le samedi 18 novembre
    départ à 16 h de la bibliothèque de Restinclières.
  • Atelier tapenade pour les enfants le mercredi 15 novembre (uniquement sur inscription).

À la salle du foyer de Beaulieu (près du stade ici)

  • Samedi 18 novembre à 20h sur l’histoire de la transformation de l’olivier par l’homme au cours des siècles et sur la culture et la production de l’olivier. Avec la participation de Jean Frédéric Terral, professeur à l’université de Montpellier et chercheur à l’ISEM (Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier) et Jean-Michel Duriez, Directeur Adjoint de l’AFIDOL (Association Française Interprofessionnelle de l’Olive).Cette soirée est gratuite. Elle sera suivie d’un débat avec le public et les producteurs locaux et sera clôturée par un buffet.
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Rameaux Olives Tournantes

Depuis les années 1990, la culture de l’olivier s’intensifie et en corollaire se développent des pratiques en rupture avec l’image de l’olivier : plantation à haute densité, mécanisation de la récolte et augmentation des intrants (eau, engrais, traitement). L’image d’une culture « naturelle » disparait.

La culture de l’olivier pour des secteurs en difficulté a eu aussi pour conséquence la mise en place d’oliveraies dans de nouvelles zones produisant une prolifération de la mouche de l’olive, facteur de risque particulièrement surveillé.

Combinée à des facteurs du milieu changeant (augmentation des températures, modification des régimes de pluies) mais aussi à une demande de la société de plus en plus soucieuse de produits locaux et de qualité, la production oléicole se doit de raisonner la diversification variétale, les techniques de taille et la lutte contre la mouche. Mieux gérer, c’est mieux connaître et bien que l’homme et l’olivier se côtoient depuis des millénaires, l’histoire de la transformation de cette plante au contact de l’homme et sa culture  nous cachent encore bien des secrets.

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Regards croisés

Hier et aujourd’hui
Notre environnement proche
Evolution de notre perception de la nature

Jean-Pierre Fels, président de l’association ARBRE présente en quelques mots les objectifs de l’association et les actions menées dernièrement par les bénévoles, notamment les sorties nature à proximité des deux villages. Il rappelle aussi la nécessité d’apporter un soutien actif en adhérant à l’association.

Yves Caraglio, botaniste, chercheur et agriculteur, est chargé de conduire les débats.

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La soirée commence avec le visionnage d’un montage vidéo à partir du témoignage de Monsieur Hubert TESSE, ancien métayer au mas du château à Restinclières, qui indique qu’en l’espace de 50 ans on est passé de 40 à 3 exploitants agricoles. Il est question aussi du Pic Saint-Loup dont l’apparence donne lieu à des conjectures atmosphériques par rapport aux travaux agricoles.

Édouard Aujaleu, Président des Amis du musée Fabre à Montpellier, prend le relais pour nous parler de l’invention du paysage en prenant la précaution de le différencier de l’environnement, milieu où interagissent des éléments physiques.

Le paysage résulte d’un regard spécifique d’origine artistique et est lié à notre histoire culturelle et personnelle. Il est le fruit de représentations artistiques très larges comme la littérature, la peinture, la télévision, les publicités.Édouard Aujaleu fait référence à Oscar Wilde qui affirmait dans Le déclin du mensonge que c’est la vie qui imite l’art et non l’inverse.

Sur l’écran s’affiche le tableau de William Turner Pluie, vapeur, vitesse -1844 :

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Bioulès a peint le Pic Saint-Loup :

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De même Cézanne a largement contribué au succès de La montagne Sainte-Victoire :

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Le paysan a une vision pratique et non esthétique du paysage. Des sociétés comme l’Inde ne sont pas paysagères. En revanche la Chine reste la première société paysagère.

Dans les sociétés occidentales il faut attendre la Renaissance pour la mise en lumière du paysage à travers la fenêtre.

Robert Campin (1378-1444), peintre primitif flamandLa Madone à l’écran d’osier (entre 1425 et 1430) :

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Jacob Van Ruysdael – Vue de Harlem – 1670 :

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Les éléments naturels acquièrent alors une valeur esthétique.Édouard Aujaleu parle d’une laïcisation du paysage qui perd sa valeur religieuse. L’invention de la perspective permet aussi une mise à distance. Pour l’élite urbaine et à la différence du paysan, le «pays» n’est pas le milieu du travail.

À la Renaissance, la perception du pays se définit par trois données ou trois natures :

  • La nature sauvage : les montagnes et les forêts
  • L’espace agricole
  • Le jardin d’agrément né d’une perception culturelle.

Rossellino – Le jardin du pape Pie II Piccolomini à Pienza – 1450 :

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1 – La campagne – c’est ce qui entoure le village et qui est en partie cultivée et en partie sauvage.

Poussin Ruth et Booz ou l’été 1660-1664 :

Poussin – Ruth et Booz ou l’été 1660-1664.png

Les peintres du Nord ont largement contribué à la peinture de paysages.

Meindert HobbemaLe chemin de Middelharnis – 1689 :

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Les impressionnistes ont peint une campagne plus modeste.

Claude MonetCoquelicots – 1873 :

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2 – La montagne   –

Avant la fin du XVIIIe siècle, la montagne était considérée comme le pays affreux, dangereux, froid, hostile. Montesquieu après un voyage au Tyrol a trouvé que c’était un très mauvais pays. William Turner a ressenti la même chose après un séjour à Bonneville. Cela va changer avec Rousseau et sa Nouvelle Héloïse. Les romantiques vont mettre au goût du jour l’esthétique du sublime : le paysage vous élève.

FriedrichLe voyageur contemplant une mer de nuages – 1818 :

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Mais en matière de montagnes, c’est la photographie qui va permettre une sensibilisation à une esthétique particulière (les crevasses …).

3 – Il en sera de même des rivages marins –

Van GoyenScène de plage – 1638 :

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William TurnerLa plage de Calais – 1803 :

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Sorolla – Promenade sur le bord de mer – 1909 :

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Avant la mer était inquiétante. M. Aujaleu recommande la lecture du livre d’Alain Corbin Le Territoire du vide. L’Occident et le désir du rivage. Les naufrages, le déchainement des éléments ont une beauté terrible. Il a fallu du temps avant que cela représente un beau spectacle. On contemple désormais le déchainement de la nature.

4 – Le désert –

Le goût pour le désert est venu de la littérature, de la peinture, du cinéma (les westerns). La réalité est bien différente. Il s’agit la plupart du temps de déserts de cailloux. On voit Les dunes au cinéma ou dans les tableaux des peintres orientalistes. Monument Valley, La Prisonnière du désert de John Ford (1956), Le crabe aux pinces d’or (Hergé) ont forgé notre imaginaire.

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La beauté de la nature sauvage est née aux Etats-Unis où ont été créés les premiers parcs nationaux. Il s’agit alors d’encadrer un fragment de paysage.

BierstadLes montagnes rocheuses – 1870 :

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La perception du paysage n’a rien de naturel. C’est une création culturelle nous dit Édouard Aujaleu.

La perception esthétique a d’abord été le privilège des couches privilégiées de la société.

L’agriculteur moderne n’est plus un paysan. Il a désormais un regard distancié.

On parle actuellement de protection des paysages mais peut-on affirmer qu’il y a une dégradation des paysages ? Deux exemples interrogent :

  • Le pont du Gard constitue aujourd’hui un vrai paysage construit, objet de tous les soins.
  • Le viaduc de Millau a institué le paysage que l’on admire aujourd’hui.

Sur une question d’une auditrice évoquant Ulysse,Édouard Aujaleu parle d’une exception. Dans l’Odyssée, Ulysse revient à Ithaque et on a des descriptions de son voyage mais la mer est dangereuse et n’est pas considérée comme positive.

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Avant de donner la parole à Jocelyne Bonnet-Carbonell, ethnologue, qui va nous parler de la vie dans les mazets, Yves Caraglio nous fait entendre le témoignage émouvant d’un habitant de Beaulieu, Emile Lioure, sur le travail dans les carrières et les différents outils utilisés notamment l’escoude.

La vie dans les mazets, c’est 2500 ans d’histoire !

Mazet dans la commune de Beaulieu :

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1000 ans avant J.C. des gens habitaient des territoires peu exploités. Mme Bonnet nous parle de la cabane de la Liquière de Calvisson dont la construction remonterait à 7 siècles avant J.C. De forme oblongue, elle était constituée d’une seule pièce. Elle cite également la cabane de Gailhan que l’on situe 5 siècles avant J.C., une sorte de mazet composé de deux pièces à la toiture constituée de branchages et de terre, dans lequel on stockait des matériaux. Des archéologues ont repéré deux feux, un feu intérieur sacré sur une plaque de terre décorée et un feu extérieur, des étendoirs, des bancs de pierre pour se coucher et s’asseoir.

Reconstitution de la cabane de Gailhan :

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Les mazets vignerons, constitués d’une ou deux pièces, se différencient des capitelles, cabanes de bergers en pierres locales. A Calvisson on peut voir un mazet construit en 1870 et entouré de murs.

Capitelle dans la commune de Beaulieu :

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Avec la déprise agricole –l’arrachage des vignes- les mazets sont de plus en plus abandonnés ou ont été transformés en maison secondaire, voire en habitation principale avec une transformation de leur apparence.

Le mazet vigneron a constitué un véritable art de vivre pendant des siècles. Nos ancêtres nous l’ont légué. Par sa situation en dehors du village il répondait à la fonctionnalité de la vigne. Leurs habitants élevaient des chèvres, des cochons, des volailles. Ils mangeaient peu de viande, chassaient le gros gibier et consommaient du poisson.

Dans les temps anciens, les Etrusques cabotaient en Méditerranée. Ils laissaient leur cargaison au Caylar. Des vases noirs sont en cours de découverte. Ils contenaient du vin. A l’époque on bougeait, on vivait, on commerçait. L’anchois était utilisé dans de nombreux plats –l’omelette- pour saler et épicer. Faute de légumes cultivés, on mangeait de la salade sauvage –la roquette-, des escargots. Ces habitudes sont restées dans l’inconscient collectif.

Cet habitat modeste (40 à 60 m2) composé de deux petites pièces va influencer les modes de vie. On le construisait avec les pierres trouvées sur place. Il y avait peu ou pas de fenêtres, pas d’eau, mais toujours des bancs, une cheminée et un piège à lapins. Les protestants plantaient un cyprès. Pour la naissance d’une fille les catholiques plantaient un grenadier. C’était la maison des hommes en Languedoc. On peut parler d’un art de vivre masculin et saisonnier –de mars-avril à octobre-. A certaines occasions on y invitait ses proches. On consommait de la crème de lait stockée dans de grandes jarres, des plats cuisinés provenant de la maison principale. On grillait des saucisses. Jusqu’au XIXème siècle on vivait dans des villages en hauteur car les routes étaient embourbées. Aujourd’hui ces petites maisons sont menacées par notre incompréhension. Mme Bonnet aimerait sensibiliser les maires à la protection de ce petit bâti. A Calvisson des panneaux informent les promeneurs sur les mazets.

Jocelyne Bonnet nous apprend que tous les vignobles d’Europe ont les mêmes mazets. On peut parler d’une civilisation du mazet. En Hongrie elle a été reçue par des occupants d’un mazet qui lui ont fait goûter le lard grillé à l’extérieur et présenté sur une grande tranche de pain, accompagné de vin et d’alcool : art de vivre masculin.

Elle évoque les quelques mazets qui subsistent au bord du Vidourle et qui sont menacés de disparition. C’est, nous dit-elle, notre civilisation régionale qui est menacée. Il faut les protéger. En Italie, en Roumanie et en Hongrie les mazets ne sont pas en ruine.

Sur une question d’un auditeur qui évoque la disparition de leur utilisation traditionnelle liée à la vigne, elle précise que leur fonction familiale perdure.

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Pour conclure, Yves Caraglio évoque l’évolution de la population des deux villages : en 1980, 500 habitants à Beaulieu et 200 à Restinclières. Aujourd’hui chaque village avoisine les 1700 habitants. Pour accueillir ce surcroît de population on a augmenté la densification au kilomètre carré d’où des lectures différentes de paysages.
Se pose aujourd’hui le problème du lien social. Les fêtes de village et les associations ont un rôle à jouer.

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La soirée s’est poursuivie avec des échanges autour de quelques agapes gourmandes sans oublier l’exposition de reproductions de mazets miniatures confectionnées avec talent par Florence Begni dont l’atelier se visite à Lecques (florence.begni.les prosdemaville.fr).

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Le compte-rendu témoigne de la qualité des deux intervenants que nous remercions chaleureusement.

Pour ARBRE : Régine Paris

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